Réflexion sur la connaissance avec Mioara Mugur-Schächter et Jean-Paul Baquiast
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Réflexion sur la connaissance avec Jean-Paul Baquiast
liens: wikipedia.org -Mioara Mugur-Schächter
wikipedia.org -Mioara Mugur-Schächter et Constructivisme (épistémologie)
wikipedia.org -Mioara Mugur-Schächter et la MCR
wikipedia.org -Mioara Mugur-Schächter et Constructivisme (épistémologie)
wikipedia.org -Mioara Mugur-Schächter et la MCR
arkandis.com -Miora Mugur-Schächter – MCR méthode de conceptualisation relativisée
philoscienphilosciencece.over-blog.com -la méthode de conception relativisée (Le blog de Jean-Paul Baquiast et de Christophe Jacquemin)
mugur-schachter.net -SUR LE TISSAGE DES CONNAISSANCES
mugur-schachter.net -L'OBJET DE adMCR
leslimitesdelaconnaissance.centerblog.net -Réflexion sur la connaissance avec Jean-Paul Baquiast
automatesintelligents.com -La méthode de conceptualisation relativisée (MCR) pour mieux analyser la grande crise climatique
philoscience.over-blog.com -La méthode de conception relativisée: De la physique quantique à l'ensemble des processus de construction des connaissances
blogs.mediapart.fr/blog/jean-paul-baquiast -la-methode-de-conceptualisation-relativisee-mcr
afscet.asso.fr -Application de la Méthode de Conceptualisation Relativisée à la maîtrise des systèmes complexes
automatesintelligents.com -Libre arbitre et Hasard intrinsèque (sur A New Kind of Science, de Stephen Wolfram
http://www.cphi2.org/Portals/4/S%C3%A9ance%20du%2031%20janvier%20%20relev%C3%A9%20%20corrig%C3%A9%20par%20intervenants%20V2.pdf (Collège de physique et de philosophie Séance du 31 janvier 2011 Bernard d’Espagnat, michel bitbol, carlo rovelli, franck laloë, hervé zwirn, jean paul basquiat...)
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http://www.cphi2.org/Portals/4/S%C3%A9ance%20du%2031%20janvier%20%20relev%C3%A9%20%20corrig%C3%A9%20par%20intervenants%20V2.pdf (Collège de physique et de philosophie Séance du 31 janvier 2011 Bernard d’Espagnat, michel bitbol, carlo rovelli, franck laloë, hervé zwirn, jean paul basquiat...)
1) Préambule.
*Je suis en train de lire le blog automates intelligents avec le théorème du jardin par Christian Magnan présenté et commenté par Jean-Paul Baquiast (23/11/2011) et la méthode de Miora Mugür-Schachter.
*Je suggère aussi la lecture de Jean-Paul Baquiast : le paradoxe des sapiens
* La méthode de Miora Mugür schachter
a) Un préambule de Jean-Paul Baquiast:
Une communauté d'approche entre la physique quantique et la cosmologie rendrait particulièrement opportune, selon nous, l'extension à cette dernière de la Méthode de Conceptualisation Relativisée de Mme Mugur-Schachter, extension que nous recommandons par ailleurs. Il s'agit de la vaste question du "réalisme" en science, que nous n'aborderons pas ici. On pourra lire sur ce sujet un de nos article récents automatesintelligent.blog.lemonde.fr/
Le tissage des connaissance" de Miora Mugür-Schachter
La théorie de l’auteur est née de la mécanique quantique qui a déclenché une crise concernant la manière de réfléchir sur la réalité et de communiquer à son sujet.
À partir d’un certain nombre de postulats quantiques ( édictés par Einstein, Planck, Bohr, Schrödinger, Heisenberg ...) on est arrivé à une formalisation mathématique d’une théorie performante et pertinente, mais NON REPRÉSENTABLE, NON COMPRÉHENSIBLE.
Dans la physique classique, on a des faits, on leur applique des qualifications toute prêtes (grand, petit, rond, rouge...) grâce auxquelles on décrit les phénomènes. Mais ici, on a des faits très curieux : on parle de “micro-états” qui ne ressemblent à rien de ce que l’on connaissait déjà et qui ont cependant donné naissance à un formalisme mathématique TRÈS PERFORMANT ET TRÈS COHÉRENT. S’agit-il d’algorithmes, c’est-à-dire d’un ensemble de règles opératoires dont l’application permet de résoudre un problème énoncé au moyen d’un nombre fini d’opérations, ou s’agit-il d’une véritable description physique?
On a quelque chose qui fonctionne et qui présente cependant un aspect INCOMPRÉHENSIBLE qui interroge furieusement. D’où la nécessité de DESCENDRE dans les processus de connaissance, autrement dit, de descendre sous les strates du langage.
En réfléchissant à ce problème, l’auteur constate que c’est le formalisme qui empêche de comprendre. Si on fait table rase du formalisme, on peut saisir ce qu’est un “micro-état”. On constate alors que l’on a, face à face, un objet et des qualifications. Dans la logique classique, l’objet et les classifications sont déjà donnés. Dans la physique quantique, on constate que l’on est obligé DE FORGER D’ABORD CE QUE L’ON VA CONSIDÉRER ENSUITE COMME OBJET DE DESCRIPTION.
On forge des qualificateurs. De sorte que “décrire”, pour “communiquer”, est semblable à un processus de création. Le processus de Fonctionnement-conscience (FC) décrit l’activité d’un observateur-concepteur. Cet observateur-concepteur est UTILISATEUR de qualifications déjà existantes - apparemment - dans la physique classique, MAIS il est CONCEPTEUR de qualifications dans la physique quantique. Et l’auteur constate ensuite que ce processus de qualificateurs est universel. C’est le processus de formation du langage qui fait appel à des qualifications : “grands”, petits” ronds” “carrés”, “colorés”, etc. etc. C’est en faisant appel à ces qualifications que l’on peut décrire un objet et “communiquer” à son sujet.
Je trouve tout à fait intéressante - et inhabituelle pour moi - cette manière de réfléchir , à partir de la physique et d’une physique “non représentable”. Et c’est parce qu’elle est non représentable qu’elle a posé des questions nouvelles dont la réponse s’est avérée pertinente pour toute la physique.
Je ne garantis pas de traduire exactement la pensée de l'auteur. Je lui ai adressé un mail pour avoir son avis : me prendra-t-elle assez au sérieux pur me répondre et si oui, aura-t-elle le temps de le faire ? Je ne manquerai pas de vous tenir au courant de ses critiques, à moins qu'elle ne le fasse elle-même.
À partir d’un certain nombre de postulats quantiques ( édictés par Einstein, Planck, Bohr, Schrödinger, Heisenberg ...) on est arrivé à une formalisation mathématique d’une théorie performante et pertinente, mais NON REPRÉSENTABLE, NON COMPRÉHENSIBLE.
Dans la physique classique, on a des faits, on leur applique des qualifications toute prêtes (grand, petit, rond, rouge...) grâce auxquelles on décrit les phénomènes. Mais ici, on a des faits très curieux : on parle de “micro-états” qui ne ressemblent à rien de ce que l’on connaissait déjà et qui ont cependant donné naissance à un formalisme mathématique TRÈS PERFORMANT ET TRÈS COHÉRENT. S’agit-il d’algorithmes, c’est-à-dire d’un ensemble de règles opératoires dont l’application permet de résoudre un problème énoncé au moyen d’un nombre fini d’opérations, ou s’agit-il d’une véritable description physique?
On a quelque chose qui fonctionne et qui présente cependant un aspect INCOMPRÉHENSIBLE qui interroge furieusement. D’où la nécessité de DESCENDRE dans les processus de connaissance, autrement dit, de descendre sous les strates du langage.
En réfléchissant à ce problème, l’auteur constate que c’est le formalisme qui empêche de comprendre. Si on fait table rase du formalisme, on peut saisir ce qu’est un “micro-état”. On constate alors que l’on a, face à face, un objet et des qualifications. Dans la logique classique, l’objet et les classifications sont déjà donnés. Dans la physique quantique, on constate que l’on est obligé DE FORGER D’ABORD CE QUE L’ON VA CONSIDÉRER ENSUITE COMME OBJET DE DESCRIPTION.
On forge des qualificateurs. De sorte que “décrire”, pour “communiquer”, est semblable à un processus de création. Le processus de Fonctionnement-conscience (FC) décrit l’activité d’un observateur-concepteur. Cet observateur-concepteur est UTILISATEUR de qualifications déjà existantes - apparemment - dans la physique classique, MAIS il est CONCEPTEUR de qualifications dans la physique quantique. Et l’auteur constate ensuite que ce processus de qualificateurs est universel. C’est le processus de formation du langage qui fait appel à des qualifications : “grands”, petits” ronds” “carrés”, “colorés”, etc. etc. C’est en faisant appel à ces qualifications que l’on peut décrire un objet et “communiquer” à son sujet.
Je trouve tout à fait intéressante - et inhabituelle pour moi - cette manière de réfléchir , à partir de la physique et d’une physique “non représentable”. Et c’est parce qu’elle est non représentable qu’elle a posé des questions nouvelles dont la réponse s’est avérée pertinente pour toute la physique.
Je ne garantis pas de traduire exactement la pensée de l'auteur. Je lui ai adressé un mail pour avoir son avis : me prendra-t-elle assez au sérieux pur me répondre et si oui, aura-t-elle le temps de le faire ? Je ne manquerai pas de vous tenir au courant de ses critiques, à moins qu'elle ne le fasse elle-même.
Je transcris ici dans mon blog l'introduction et la conclusion générale de la méthode de Miora Mûgur Schächter pour m'en imprégner et la partager avant de réfléchir sur le théorème du jardin et le commentaire de Jean-Paul Baquiast.
Méthode de Miora Mugur Schächter (Le réel et la connaissance versus la pensée courante, l’épistémologie philosophique et la physique)
I) I n t r o d u c t i o n g é n é r a l e
À peine quelques années sont passées depuis que Richard Feynman a frappé les
esprits en déclarant: « Je crois pouvoir dire sans me tromper que personne ne comprend
la mécanique quantique ». Depuis, d’autres physiciens ont exprimé avec force le même
constat (Lee Smolin [2007]).
Mais pourquoi la mécanique quantique oppose-t-elle une difficulté si particulière
aux efforts de la comprendre?
Je pense avoir identifié la réponse à cette question. Elle conduit à affirmer que le
formalisme quantique a incorporé les principes d’une révolution radicale de
l’épistémologie. Et le développement de ces principes engendre une refonte foncière de
nos connaissances et de nos croyances concernant notre manière d’engendrer des
connaissances.
Le formalisme quantique n’a introduit ce noyau révolutionnaire qu’en état diffus
et cryptique, lors de la construction d’une représentation particulière, celle des états
d’entités physiques microscopiques. Mais, d’une manière inattendue, j’ai pu synthétiser
une forme intégrée et explicite de ce noyau où sa structure et modes de fonctionnement
apparaissent au grand jour. Ensuite, par des extensions et une organisation appropriées,
j’ai développé ce noyau en une « méthode générale de conceptualisation relativisée ».
Cette méthode est explicitement enracinée en dessous des langages, directement
dans la factualité physique a-conceptuelle, comme c’est le cas, en particulier, pour les
descriptions quantiques des microétats. Par la généralisation de ce trait – que l’analyse
révèle être un trait universel de la conceptualisation humaine – la méthode de
conceptualisation relativisée incorpore à sa base toute l’essence des contenus
épistémologiques encryptés dans le formalisme quantique, ainsi que leurs remarquables
puissances spécifiques. En outre, à la différence du formalisme quantique, la méthode
de conceptualisation relativisée offre désormais une représentation explicite de la toute
première phase des processus de construction humaine de connaissances. Cependant
que la structure, et l’existence même, de cette première phase universelle de la
conceptualisation, est entièrement ignorée par les épistémologies actuelles, kantienne,
husserlienne, psychologique et biopsychologique, de même que par la logique, les
probabilités, et toute la physique classique.
D’autre part, la méthode de conceptualisation relativisée permet d’expliciter la
structure de la question métaphysique du réel, faisant ainsi corps avec la philosophie et
l’unissant aux démarches de type ‘scientifique’.
La méthode générale de conceptualisation évoquée plus haut a déjà été exposée
dans toutes ses phases successives. D’abord dans une suite d’articles spécialisés qui a
débuté en 1984 (MMS [1984], [1992], [1995], [2002A], [2002B]). En outre, l’état
présent de cette méthode et les applications majeures élaborées à ce jour sont présentés 11
in extenso, avec détail et aussi rigoureusement qu'il m'a été possible, dans un livre paru
récemment (MMS [2006].
Par contre, les sources de la méthode n’ont jamais encore été exposées d’une
manière construite et détaillée. Tout simplement parce qu’elles n’avaient pas encore
acquis dans mon esprit une forme intégrée. Ces sources ont certainement agi de manière
intuitive tout au cours des recherches que j’ai consacrées aux problèmes d’interprétation
que le formalisme de la mécanique quantique ne cesse de soulever depuis plus de 75
ans. Très lentement, ces recherches ont développé en vrac: des brins de solution à l’une
ou l’autre de ces questions d’interprétation ; les lignes propres de la méthode générale
de conceptualisation relativisée ; et les différentes applications de la méthode générale.
Mais les quelques compréhensions locales engendrées par ce processus indifférencié
concernant spécifiquement les questions d’interprétation, brillaient éparses, sans se
rattacher à une organisation conceptuelle unique, explicite, construite et cohérente.
Puis, le processus d’investigation qui se développait à atteint un point critique, par
l’émergence d’une hypothèse qui suggérait une stratégie globale pour arriver à
véritablement maîtriser la manière de signifier du formalisme quantique: faire table rase
du formalisme mathématique et construire la description d’un microétat en termes
strictement qualitatifs, telle qu’elle émerge sous les contraintes exclusives de la
situation cognitive où l’on se trouve et des modes humains de conceptualisation. En un
temps relativement très bref, la mise en œuvre de cette stratégie a précipité en effet une
organisation conceptuelle qui se présente comme une infra-mécanique quantique,
comme une réprésentation qualitative des descriptions quelconques de microétats
(mécaniques ou autres) logée en dessous du formalisme mathématique de la mécanique
quantique.
L’infra-mécanique quantique expose finalement à tous les regards, structurée,
l’entière manière de signifier du formalisme quantique. Et son cœur même – la forme
descriptionnelle spécifique qu’elle produit concernant les microétats – est cet embryon
annoncé, d’une révolution de nos connaissances concernant nos manières d’engendrer
des connaissances.
Dans le formalisme de la mécanique quantique, la forme descriptionnelle qui
commande la structure mathématique, reste inapparente. Seuls les fragments de cette
forme peuvent y être devinés, incorporés épars aux algorithmes de façon rigide et
cryptique. Ils y font problème, comme les restes d’un animal aujourd’hui inconnu,
éparpillés et pétrifiés dans une roche, constituent un problème pour les paléontologues.
Or dans l’infra-mécanique quantique cette forme descriptionnelle se montre en état
intégré. Elle s’y montre nue, extraite hors de toute carapace mathématique et concentrée
en une structure autonome animée de modes propres de fonctionner. Il s’agit
véritablement d’un être descriptionnel d’un type foncièrement nouveau, qui s’expose et
agit sous les yeux de tous, quand rien ne l’annonçait, ni les grammaires, ni la logique et
les probabilités classiques, ni la physique classique ou la relativité einsteinienne.
Et à la lumière des analyses subséquentes, les descriptions de ce type insoupçonné
se sont révélées constituer universellement une toute première strate de l’entière
conceptualisation humaine.
Dans la méthode de conceptualisation relativisée cette universalité est représentée
dans toute sa généralité.
Si l’on considère l’infra-mécanique quantique dans son ensemble, elle constitue
désormais une structure épistémologique-méthodologique de référence qui permet
d’envisager un traitement de l’ensemble des problèmes d’interprétation soulevés par le
formalisme quantique, en bloc et sous des contraintes de cohérence globales ; un 12
traitement à accomplir par un système de comparaisons entre, d’une part le formalisme
quantique mathématique, et d’autre part l’infra-mécanique quantique telle qu’elle a
émergé indépendamment (MMS [ 2009].
Dans ce livre je présente l’infra-mécanique quantique sans nullement aborder les
questions d’interprétation du formalisme mathématique de la mécanique quantique.
Ce qui est révolutionnaire est toujours d’abord très difficile à percevoir. Le déjà
connu, tel qu’il est connu, attire vers ses propres formes tout ce qui pénètre dans le
champ de l’attention. Pourtant dans le cas qui nous occupe cette difficulté peut être
vaincue. Une traduction d’un langage mathématique en un langage courant aurait
irrépressiblement appauvri et obscurci la précision et la structure de significations
incorporée au formalisme quantique. Mais l’infra-mécanique quantique n’est pas une
traduction de ce type. Elle est le résultat d’une construction indépendante, directement
de la structure épistémologique-méthodologique des descriptions de microétats. Chaque
pas de cette construction est marqué d’une nécessité imposée par la situation cognitive
dans laquelle on se trouve et par des impératifs conceptuels-logiques. Je me suis
astreinte à faire ressortir cela d’une manière très claire.
J’ai tenté de maintenir la présentation constamment accessible à un grand nombre
d’intellectuels et pourtant tout à fait rigoureuse quant aux significations et, à chaque
pas, de mettre en évidence ce que ce pas-là comporte de radicalement nouveau.
En dehors de son intérêt conceptuel, l’infra-mécanique quantique possède aussi
une certaine importance pragmatique.
Il existe des croyances religieuses, morales, économiques, etc. Et il existe aussi
des croyances épistémologiques. Celles-ci sont très profondément enracinées dans le
psychisme humain. Probablement même d’une manière plus uniforme et plus agissante
que les croyances religieuses. Corrélativement, elles sont enracinées dans les langages
courants et y affleurent dans ses formes les plus fondamentales (par exemple, “cet arbre
est vert” – pas “je le vois vert’’ –, ce qui, d’emblée, absolutise nos perceptions
humaines). Par cette voie des langages courants les croyances épistémologiques
s’infusent constamment dans tous les actes de pensée. Ainsi ces actes, parce qu’ils
agissent en conformité avec elles, semblent confirmer les croyances épistémologiques
qu’ils ont incorporées. Cette sorte de circularité charge subrepticement les croyances
épistémologiques d’une inertie très difficile à vaincre. Car ce dont on perçoit souvent
l’assertion se travestit en vérité testée.
Et pourtant les croyances épistémologiques évoluent, irrépressiblement. L’un des
moteurs de leur évolution sont les apports des flux minces mais continuels qui émanent
des sciences dures et qui s’infiltrent dans la pensée publique. Mais cette évolution se
produit très lentement et d’une façon plus ou moins implicite et chaotique. Ceci entraîne
qu’elle reste sans contour et non contrôlée. Or il serait utile que l’évolution des
croyances épistémologiques se produise d’une manière exposée aux regards, et rapide,
et qu’elle puisse être guidée et optimisée. Car, à l’intérieur de la catégorie générale des
croyances, les croyances épistémologiques constituent un cas tout à fait spécial, chargé
de potentialités qu’il est dommage de laisser dormantes:
Bien que très fortement agissantes, les croyances épistémologiques sont le plus
souvent quasi inconnues des esprits où elles agissent. Un nombre de gens relativement
infime en sont avertis. Et même parmi ceux-ci, une connaissance explicite, claire et
approfondie du contenu des croyances épistémologiques qui les animent, est restée
jusqu’ici très rare. Ces croyances travaillent d’une manière comparable à celle des
réflexes neurophysiologiques auxquels d’ailleurs elles sont liées. D’autant plus, quand il 13
s’agit de changements de contenu des croyances épistémologiques, la connaissance de
ceux-ci reste encore plus enfouie, plus rare et vague, presque évanescente.
D’autre part, rien ne peut empêcher les changements de croyances
épistémologiques, puisque ces changements sont enracinés dans l’état des sciences de la
nature, qui, lui, change irrépressiblement. De là, de cet état des sciences auquel ils sont
liés, les changements de croyances épistémologiques pénètrent directement dans les
sous-conscients, portés surtout par les techniques tirées des sciences dures, qu’un très
grand nombre de gens sont amenés à s’approprier. Ainsi les changements de croyances
épistémologiques se trouvent sous l’empire de contraintes d’ordre pratique qui
contribuent à régir les relations entre l’homme et le réel physique. Par cette voie ils sont
protégés à la fois des trémoussements arbitraires des modes et des inerties de l’esprit.
Malgré leur état implicite et en dépit des forces inertielles qui lestent toute croyance et
notamment certains paradigmes de la pensée scientifique déclarée, les croyances
épistémologiques changent avec la mentalité technique.
Enfin, cependant que leur genèse et leurs contenus sont ainsi liés à la phase de
développement des sciences de la nature et des techniques correspondantes, les
croyances épistémologiques réagissent sur cette phase. Or la phase de développement
des sciences et des techniques, elle, produit un impact crucial sur les évolutions
économiques et sociales. En conséquence de cet enchaînement réflexif, les croyances
épistémologiques – si elles étaient connues explicitement et à fond – pourraient libérer
des forces d’orientation voulue et directe des évolutions sociales et économiques.
Potentiellement, elles sont un point d’appui stratégique pour obtenir des effets de levier.
Pour ces raisons au moins, il est important d’un point de vue pragmatique de
connaître d’une manière explicite les croyances épistémologiques induites par les
sciences de la nature, dans chaque phase de leur évolution, et de contrôler l’accord
évolutif de ces croyances avec les vues générales qui agissent, notamment dans la
pensée scientifique.
Dès qu’on a disposé de recul il a toujours été possible d’expliciter les croyances
épistémologiques induites par telle ou telle phase du développement des sciences de la
nature. Mais maintenant, en ce moment précis de l’histoire de la pensée que nous
sommes en train de vivre, il est d’importance très particulière de mettre cette possibilité
à l’œuvre, parce que c’est la mécanique quantique qui y est impliquée et que les
schémas épistémologiques encryptés dans le formalisme de la mécanique quantique
fondamentale violent des croyances épistémologiques qui agissent dans la pensée
scientifique tout autant que dans la pensée courante, depuis plus de trois siècles. Tous
ceux qui réfléchissent à la pensée le pressentent. Ils pressentent que dans cette
résistance tellement persistante à une compréhension consensuelle opposée par un
formalisme qui, d’autre part, est doté d’une si remarquable efficacité, il doit se nicher
l’un de ces mystères précieux qui, lorsqu’ils sont levés, font apparaître une nouvelle
face des choses.
Ce livre s’adresse à tous ceux qui désirent pénétrer jusqu’aux racines de la
conceptualisation humaines et former une vue sur la manière dont y émergent les
descriptions de microétats incorporées à l’état cryptique dans le formalisme
mathématique de la mécanique quantique fondamentale. Sa lecture aura également
l’effet de les rendre immédiatement réceptifs à l’exposé de la méthode générale de
conceptualisation relativisée (MMS [2006]), une épistémologie qualitative mais
formalisée, solidement fondée dans la pensée scientifique actuelle et qui couvre les
processus de génération de connaissances depuis l’encore jamais conceptualisé et 14
jusqu’à la frontière entre le connu et le métaphysique. Mais il paraît probable que
l'infra-mécanique quantique intéressera de la manière la plus intense une certaine
catégorie de physiciens qui la comprendront profondément et à mi-mot. Même si cette
catégorie est numériquement réduite, c'est elle qui pourrait constituer un noyau de
renouvellement de la physique actuelle.
L'exposé de ce texte est organisé en quatre très brèves parties.
La première, via des considérations informelles concernant les questions
philosophiques du réel et de la connaissance, repère la place qu’occupe la mécanique
quantique dans l’évolution de la pensée.
La deuxième partie expose le processus de construction de l’infra-mécanique
quantique.
La troisième partie examine très brièvement l'infra-mécanique quantique de
manière globale, de l'extérieur, avec le but de spécifier ses relations avec les concepts
d'espace, de temps, de géométrie, de consensus intersubjectif, et avec les théories de
relativité d'Einstein. Les conclusions tirées de ces examens permettent d'éclairer le
problème de localité et de mettre ainsi en évidence son caractère illusoire.
Enfin, la quatrième partie, elle aussi très brève, explicite les potentialités de
novation épistémologique incorporées dans l’infra-mécanique quantique, et indique la
voie qui, en réalisant ces potentialités, a conduit vers la construction d’une méthode
générale de conceptualisation relativisée.
Les contenus inorganisés de l’infra-mécanique quantique ont nourri pas à pas la
genèse de la méthode générale de conceptualisation relativisée, en se mêlant aux
guidages sous terrains de l’intuition avant que ces deux systèmes conceptuels se fussent
constitués et séparés. Mais maintenant, quand l’un comme l’autre de ces deux systèmes
est déjà construit et individualisé, les relations qui les unissent et les distinguent
mutuellement présentent un caractère nouveau.
L’infra-mécanique quantique peut être regardée comme l’illustration majeure de
la méthode générale de conceptualisation relativisée, celle qui, par son produit
descriptionnel propre, encore particulier, a révélé une toute première strate
descriptionnelle universelle qui était ignorée.
D’autre part, l’infra-mécanique quantique peut tout autant être regardée comme un
exposé systématique et approfondi des sources de la méthode générale de
conceptualisation relativisée.
Quel que soit le choix ou les oscillations entre ces deux optiques, le texte présent
et l’exposé de la méthode générale fait dans MMS [2006] constituent ensemble un tout
beaucoup plus achevé que chacun de ces deux ouvrages lus séparément. Or ceux qui
prendront connaissance des exposés de ces deux approches en succession immédiate,
seront frappés par certaines redites. Je tiens à souligner que ces redites étaient le seul
moyen de doter d’auto-suffisance chacun des deux exposés considéré séparément.
Et en tout cas, toute redondance liée à la chronologie génétique, n’a qu’une
importance provisoire. Dans l’exposé final intégré de l’entière structure conceptuelle
qui s’est constituée dans mon esprit – qui inclut la résolution de l’ensemble des
problèmes d’interprétation du formalisme quantique ainsi qu’une certaine
mathématisation de la méthode générale de conceptualisation relativisée – toute redite
aura disparu sans traces. Par cette sorte de subite harmonisation géométrisée qui est la
marque des touts achevés, les manifestations de l’inévitable temporalité des processus
de construction s’y seront dissoutes. Les rapports essentiels, atemporels, y brilleront
seuls.15
Enfin, l’on constatera que la bibliographie est réduite et en grande mesure
personnelle. Qu’on ne m’en tienne pas rigueur: cela est dû au fait que le contenu texte
qui suit rend compte de réflexions et d’une recherche solitaires à l’extrême.
II) Texte détaillé : Voir http://www.admiroutes.asso.fr/larevue/2011/115/IMQ.pdf
III) C o n c l u s i o n g é n é r a l e
Dans la première partie de cet ouvrage nous avons repéré la place qu’occupe la
mécanique quantique dans l’évolution des relations entre, d’une part, la philosophie et
notamment l’épistémologie philosophique, et d’autre part les modes de pensée qui
agissent dans les disciplines de la physique.
Dans la deuxième partie du livre nous avons entrepris de spécifier en détail les
contenus épistémologiques impliqués dans la mécanique quantique. Le résultat peut
surprendre. Tout à fait indépendamment du formalisme de la mécanique quantique, il
s’est constitué une discipline qualitative épistémo-physique, l’infra-mécanique
quantique, dont le contenu consiste en l’organisation du substrat d’opérations cognitives
et de significations encryptées dans le formalisme quantique. Dans l’infra-mécanique
quantique cette organisation sous-jacente se montre débarrassée de tout élément
mathématique, concentrée en elle-même et dotée d’un contour propre. Sa genèse,
explicitée pas à pas, la marque d’un caractère de nécessité. Le cœur de l'inframéacanique quantique est un type descriptionnel ‘transféré’ sur des enregistreurs
d’appareil, primordialement probabiliste, foncièrement différent du type descriptionnel
classique et qui, auparavant, n’avait jamais encore atteint le niveau d’une connaissance
exprimée et intégrée. Désormais ce type descriptionnel primordial est défini avec
rigueur et détail – pour le cas spécial des microétats – et il élucide la nature de la
fameuse ‘coupure quantique-classique’. Le brouillard lourd, comme solide, qui cachait
la manière de signifier de la mécanique quantique, est entièrement dissipé.
La troisième partie de l’ouvrage a brièvement indiqué que l’infra-mécanique
quantique, malgré sa forte singularité face à nos habitudes de pensée telles qu’elles se
manifestent dans les langages courants et dans l'entière pensée classique, incorpore une
certaine sorte d’universalité qui, plus ou moins clairement, se manifeste souvent dans
nos pratiques de tous les jours. C’est cette universalité qui, explicitée et épurée, a ouvert
la voie vers une épistémologie générale enracinée en dessous des langages usuels, dans
la pure factualité physique.
Cette épistémologie générale – la méthode de conceptualisation relativisée – a été
largement exposée dans d’autres ouvrages. Mais l’infra-mécanique quantique est
exposée ici pour la première fois. Elle rend visible le développement fœtal de la
méthode générale de conceptualisation relativisée, au sein du cas particulier des
descriptions de microétats. Le caractère de nécessité qui marque ce développement est
beaucoup plus concret et intuitif dans l'infra-mécanique quantique que dans sa réplique
abstraite qui se constitue dans le processus de construction de la méthode générale de
conceptualisation relativisée. Il pourra désormais irriguer cette réplique aussi d’une
nuance d’évidence intuitive.
Je finirai cet ouvrage par un aveu d’admiration. La mécanique quantique cache en
elle quelque chose de merveilleux. Chacun est assailli de temps à autre par l’impression
que ceci ou cela est merveilleux. Ou que tout est merveilleux. Mais, comme diraient les
cochons d’Orwell [1945], certaines merveilles sont plus merveilleuses que les autres. Et
la merveille de la mécanique quantique est vraiment très merveilleuse.
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BIBLIOGRAPHIE
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